La définition ordinaire des personnes douées se réfère au
fameux QI, supérieur au seuil fatidique de 130 correspondant à 2,3 %
d’une population sur une échelle donnée, la moyenne étant fixée à 100.
A partir de là, on explique que les
personnes douées ne sont pas seulement plus rapides, qu’elles ont des idées en plus grand nombre,
mais qu’elles raisonnement différemment.
Il y aurait une différence de nature entre une personne douée et une
autre, située dans la moyenne. Elles ne seraient pas plus intelligentes,
elles posséderaient une intelligence différente.
Pourtant, les tests ont été étalonnés
sur une population suffisamment nombreuse et représentative de l’ensemble de la
population d’un pays donné. Ceux qui sont au bout de cette courbe de Gauss
répondent à davantage de questions, connaissent la signification précise d’un
plus grand nombre de mots et résolvent plus de problèmes en un temps plus
court. S’ils étaient vraiment différents, leur raisonnement ne tarderait pas à
dévier pour s’écarter d’une norme dûment étalonnée. Ce raisonnement plus efficace et plus rigoureux leur permet
de pousser plus loin les limites de leurs capacités à résoudre des problèmes
élaborés par des spécialistes, et non par des extra-terrestres. Leur logique
imparable les conduit directement à la solution exacte, ils sont incapables de
se satisfaire d’une solution boiteuse ou approximative. De même, ils
parviennent à opérer des synthèses à partir d’un plus grand nombre de données,
tout en observant une rigueur logique infaillible. Tout le monde rêve de manier avec éclat ce type de processus de
pensée et y parvient parfois,
malaisément, grâce à un entraînement poussé, à condition d’être
suffisamment déterminé et de ne pas ménager ses efforts. Pour la personne
douée, il est tout naturel de parvenir à
ce même résultat, sans effort exagéré.
S’il existe une différence, elle se
situerait plutôt dans la façon d’appréhender la réalité et c’est dans cette
opération que leur sensibilité si particulière entre en jeu.
Les personnes douées ne perçoivent
pas cette réalité de la même façon : elles peuvent se montrer aveugles face à certaines
évidences, pour la plus grande joie de leur entourage, heureux de rire de cette
distraction vite proverbiale, compensant une finesse de perception fulgurante
et, cette fois, réellement hors norme,
souvent surprenante par sa justesse.
Enfants et adultes doués voient ce
que les autres ne voient pas, n’imaginent même pas dans certains cas, ils détectent, avec
le plus grand naturel et la plus grande aisance, des éléments invisibles aux
yeux du plus grand nombre, ils saisissent des détails infimes, mais dont la
portée peut être immense, et leur cerveau bien organisé, suivant la voie tracée
par la logique la plus rigoureuse, tire
de cette observation des conclusions irréfutables, toujours exactes.
Cet enchaînement est si rapide qu’il
est impossible d’en saisir toutes les étapes et donc de les expliquer aux
incrédules rationnels qui voudraient bien savoir comment cette conclusion est
apparue si rapide et si lumineuse. Ils veulent des explications aussi logiques
que leur raison et leur entêtement obstiné ne peut se satisfaire d’une absence
de démonstration étayée.
Les professeurs de mathématiques
connaissent bien ces élèves qui aboutissent dans l’instant à un résultat exact
qu’ils sont bien incapables de démontrer : il leur est apparu
immédiatement, ils ne peuvent en dire davantage, ensuite ils se désolent de
leur note médiocre alors qu’ils avaient trouvé la solution. Ils n’ont pas pensé
différemment, ils avaient bien saisi l’énoncé, ensuite les opérations se sont
enchaînées d’elles-mêmes dans leur esprit.
C’est ce même mécanisme qui préside à
la conduite d’une réflexion, avec, en plus, la capacité à détecter quelles
données doivent être prises en compte, alors qu’elles peuvent être indécelables
pour les autres. Ce serait comme une route lumineuse qui se détacherait d’un
entrelacs de chemins obscurs où on pourrait se perdre irrémédiablement, mais
les personnes douées détecteraient cette seule voie possible grâce à d’imperceptibles
signes qui leur apparaissent avec une aveuglante clarté.
Dans le quotidien scolaire, un bon
esprit de logique est, en principe, un atout appréciable, mais il est vrai que
les enfants doués ne comprennent pas toujours l’implicite et ils s’égarent
alors gravement à la surprise générale, parce qu’un énoncé de mathématique leur
a paru obscur ou qu’une question de grammaire est restée inintelligible. S’il y
a une chose que les personnes douées ont du mal à comprendre c’est bien le
jargon, pourtant en principe destiné à formuler clairement une idée en
utilisant les mots propres au domaine abordé. Il leur faut fournir des efforts
surhumains pour intégrer ces langages un peu factices tandis que les autres
enfants semblent très bien saisir la signification de ces termes volontiers
abscons. Sans doute s’attachent-ils moins au sens précis des termes. Ils les
ont déjà rencontrés, intégrés, ils en connaissent la signification, et ce langage reste cantonné aux exercices
scolaires où ce code est en vigueur. Personne n’aurait l’idée de s’exprimer de
la sorte dans son quotidien, sinon avec quantités de guillemets et une claire
mise à distance.
Le besoin de cohérence des enfants
doués les empêche d’assimiler un langage réduit à un seul type d’utilisation,
il ne peut être employé dans l’échange toujours imprégné d'affectivité, il
éloigne encore un peu plus l’enseignement de la vraie vie et donc de
l’acquisition des connaissances, devenues inutiles si elles sont formulées de
cette étrange façon.
Evoquer une intelligence différente
consiste à marginaliser définitivement les personnes douées, qui seraient alors
obligées de se résigner à vivre à l’écart ou bien, contraintes de porter un
masque indispensable, condamnées à se
forcer perpétuellement pour tenter de ressembler aux autres. Sinon, il n’y
aurait pas de salut pour elles.
Les enfants doués aiment jouer, rire
et goûter aux joies appréciées des enfants ; même s’ils se sentent parfois
à part, ils savent aussi faire partie d’un groupe et adopter ses centres d’intérêt
avec l’ardeur qu’ils mettent en toutes choses. Certains jalousent leurs
talents, d’autres les admirent, ils surprennent parfois par leur perspicacité,
mais elle ne fait pas d’eux des êtres venus d’un monde lointain et inconnu.
Il
est vrai que des adultes doués
cherchent éperdument leur planète pour ressentir la chaleur ineffable
procurée
par la fréquentation de semblables, mais c’est aussi pour le plaisir
d’une
conversation sans barrages et pour le sentiment rassurant de se voir
compris à
demi-mots. Néanmoins, chacun peut suivre leurs raisonnements et
apprécier leurs idées originales grâce à un langage commun,
utilisé tout
naturellement.
Reconnues dans leur spécificité, les
personnes douées ne se sentent pas obligatoirement étrangères aux autres, elles
peuvent, au contraire, leur apporter les riches
fruits d’une pensée créatrice et intelligible par tous.
Conseils : se garder d’attribuer tous les aspects d’un comportement,
parfois surprenant, au fait d’être doué.
Savoir que son enfant est doué constitue une grille indispensable de
lecture, mais il
est préférable de toujours rechercher les raisons de ses réactions
étonnantes. Cette grille de lecture
apporte une cohérence les éclairant avec
une logique absolue, compréhensible par
tout individu de bonne volonté.
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